Carré bleu
Il y a des peintres dont les oeuvres semblent à l’évidence des prétextes à paroles.Leurs créations suscitent le commentaire et titillent l’intellect. N Viard n’est pas de ceux-là. Sans évoquer une peinture de l’évidence qui nous laisserait cois, il faut bien admettre que ces toiles ont trop d’allant et d’allure pour ne pas se suffire à elles-mêmes. Des visages interrogateurs des débuts, aux végétaux étranges qui les ont remplacés, jusqu’aux formes actuelles justes et pertinentes, l’oeuvre de N Viard parle toute seule.De rigueur, d’énergie, mais aussi de ravissement. Car il ne faut pas s’y tromper. Les tons amortis, les vibrations sourdes, les glacis élégants, constituent le rideau de scène d’une pièce qui se joue au plus profond . Il importe de voir ces formes des profondeurs de la toile, lentement, l’une après l’autre, émergées, comme en quête d’une respiration, la surface unie bouleversée de soudaines et vastes agitations. Se mêle alors à la pure contemplation de l’équilibre des masses et de leurs tensions, l’éveil à la rêverie et au souvenir fugace, comme le parfum des pétunias blancs.L’attention rivée, on a l’impression de plonger dans l’eau des songes, des bords du cadre au centre souvent décentré, de dériver vers une clarté infuse, surgissant du fond. La peinture de Viard, instinctive et cérébrale, aboutie et inachevée, est une invitation à la noyade heureuse. |